Afrique!...
Joli texte! Je viens de l'écrire ce matin... J'ai passé la nuit chez Mireille... Je commence presque à m'installer, à prendre des habitudes dans ce petit studio... C'est juste la taille qui me convient à moi, le métro pas loin, quartier agréable pour ce que j'ai à y faire... En fait c'est pas clair tout ça...
Mireille je l'ai connue au C.E.S, on avait 15 ans, camarades de classe on était, la 3ème... depuis on s'était plus vu... et j'ai eu de ses nouvelles par mon frère grand le plus il y a... un moment, c'est pas grave... Je l'ai contactée en débarquant à Paris, envie de dire bonjour, curiosité, il paraît qu'elle chante aussi et moi je veux essayer ça à la capitale... Je mets cent balles... On s'est vu une fois, ça s'est bien passé... puis 2 fois et à la 3ème ou la 4ème, en fait c'est pas un détail majeur, on s'est embrassé et on a fait l'amour... Mention honorable...
C'est déjà pas si mal pour ce que j'ai senti de nous deux, je veux dire moi je suis sûr que c'était honorable, pas le pied, honorable pour moi je dis, elle il faudrait lui demander, mais je crois honorable aussi, pas plus non plus... C'est la vie, on se rencontre, on est seuls, on a besoin de parler, d'un peu de chaleur humaine, de tendresse, d'affection et paf!... On fait l'amour comme des grands, comme à la télé le soir... Coup de pot c'est pas la catastrophe... Ouf! Soulagé, une angoisse de moins... Super p'tit dej', grands sourires, -"Et tiens et bah eh oui"- -"On se revois bientôt"- -"Bah oui, bien sûr!"-... Évident ... Elle est sympa Mireille, on discute pas mal, on écoute de la musique jusqu'à point d'heure, ça nous fait du bien je pense, un peu retour en adolescence, sauf qu'à l'époque que dalle!
Ce matin je sais pas, mon père est mort le mois dernier pas loin, c'est le 9 mars aujourd'hui, demain j'ai rendez-vous pour la musique avec une fille qui bosse dans la pub et qui connaît du monde... peut-être... on verra... Ce matin c'est Afrique... "C'est quoi tu veux faire quand tu seras grande?"... Ça commence comme ça, et puis y'a des histoires de bois où je veux plus aller à cause des barbelés... Avec Mireille je suis allé me promener dans les forêts aux alentours de Paris, c'est plein de chemins aménagés, de tracés étudiés, de barrières blanchiées, de clôtures barbelées... aussi clôtures que barbelés on se promène avec des copains à elle, sympa aussi y sont...
Avec Mireille on a refait l'amour mais pour moi j'ai pas réatteind l'honorabilité, je crois que elle non plus mais on a pas parlé... C'est marrant cette rencontre... Juste avant j'avais revu un vieux copain flic, eh oui il est flic, il en avait marre des assurances alors il a fait flix, non flic... Quand il travaillait dans les assurances je l'appelais le Scribe... Il aimait pas, on avait pas 18 ans, aujourd'hui le scribe c'est moi, ça change... Y fait un peu cow-boy mais je l'aime bien, d'abord moi je dis on est tous flic et toc! Moi j'arrête pas de me fliquer le prem' c'est te dire!... Bon on discute surtout de son frère, mon pote Lulu qu'est en taule pour une conviction de justice intime... Le pet de la Dame au clebs... à aboyer!... on se tait...
Pour changer il me parle de San-A, le vieux qui berça nos jeunesses refoulées de ses coups de queue magiques lui le Grand, le Seul, le Beau San-Antonio! Moi ça m'a fait rêver et même fantasmer un max les aventures du Sana vers 13-14 ans, Guitou ça a dû le suivre plus tard... Enfin il me dit qu'il l'a entendu dans le poste dire, "Ecrire un roman c'est facile, il suffit d'écrire: Il poussa la porte et il entra"... et me voilà avec ça dans la tête chez mes parents, je pense à ça dans dans le lit où je dors pas, j'entends mon père qui tousse et qui râle à côté... Bonne ambiance pour un polar...
Lumière douce, je regarde la porte du coin de l'oeil, j'imagine, j'entrevois... et toc! Je me prends le papier le crayon et je dessine la scène... je commence une histoire de mec qui rentre dans une pièce, c'est pas chez lui mais il a la clé... -suspense- dans le lit une forme allongée!... Gasp!... Eh bah non, y'a pas de mort, y'a pas de sang, y'a pas de flingue, c'est juste une histoire de rencontre... non, pas "Nous Deux", pas "Intimité" non plus... je sais pas faire et en plus je trouve c'est affligeant leurs histoires, c'est juste une opinion rien de plus, en passant, je passe... d'abord j'ai même pas lu, rien que de voir la couverture...
Et j'écris ce truc quelques jours avant de rencontrer Mireille... et crac elle me propose la clé de chez elle comme ça... non pas comme ça, ça c'est dans la nouvelle, Mireille elle me propose de dormir chez elle si je suis trop fatigué pour rentrer... en tout bien tout honneur bien sûr!... Moi je me tire dégonflé mais je me dis on va coucher ensemble un jour... J'ai envie aussi faut dire mais je le dis pas... elle non plus... On se le fera plus tard comme j'ai dit déjà, mais c'est marrant quand même les coïncidences...
C'est pas la première fois que j'ai l'écriture qui anticipe, remarque c'est toujours un peu les mêmes histoires, la trame est large, vaste tissage multillénaire en tic et poc, époque antique je veux dire que c'est pas nouveau vous aviez compris je suppose sauf que dans la nouvelle on couche pas ensemble non non non, mais vous avez qu'à la lire, la Clé ça s'apelle, avec 2 p merci. Y'a pas que dans la nouvelle où j'ai pas couché, faut pas croire, souvent par peur, quelque fois par bêtise, par morale ou pas envie et aussi beaucoup par inadvertance, faut être honnête... Y'a aussi des fois ou j'ai couché par politesse ou parceque je savais pas comment faire autrement... J'ai même dû me faire un peu violer une fois ou deux... J'ai pas porté plainte...
Mireille je l'aime bien, mais je sais pas, c'est curieux ces envies qu'on a de coucher ensemble et qu'après on est souvent miteux miteux, pas fier fier, du genre si on avait su... -le sourire gêné- ... On savait pas d'abord on sait -pardon- je sais jamais moi d'abord, vous savez vous?... Vous vous posez la question des fois?... Moi c'est à chaque fois je me pose la question, à chaque fois je me demande si ça va aller, alors quand ça va, même si c'est juste honorable on se sent soulagé...
"Ouf" j'avais fait, elle aussi je crois et bon il a fallu qu'on recommence et là c'était beaucoup moins bien, et moins c'était bien moins ça allait, ça devenait dur un peu, elle devenait maternante et discourante du style "Je comprends c'est pas grave c'est ma faute", et moi ça me bloque ce genre de discours, je me renferme, idiot non?... Classique me direz-vous? Non?... Moi j'aime pas le classique de toute façon c'est l'histoire faut suivre...
On en a pas parlé avec Mireille, sur le coup je veux dire, après c'est bien aussi mais c'est tard... Tard c'est mieux que silence je pense, mais là c'est encore une opinion personnelle... Donc ce 9 mars je pense à ça, à moi, à elle, au reste, à tous les possibles que j'imagine même pas et j'écris "Je veux rester petit ou grandir vraiment, je veux pas d'intermédiaire entre ma conscience et moi"... C'est beau ça mais je lui dis pas que notre relation sexuelle me convient pas... je m'enlise dans mon silence d'usage, dommage...
Je dis pas, elle non plus, elle triche, elle joue les grandes avec la culotte brésilienne et les bretelles qui remontent sur les poignées d'amour, elle joue les libérées les affranchies, les qui savent... Moi aussi?... Peut-être peut-être... Moi je joue les artistes de province, les poètes campagnards, le gentil fils à sa mère veuve de son père, c'est pas facile comme rôle si y'en a qui veulent essayer... C'est dur le théâtre!...
J'ai besoin d'air et ce matin il fait soleil derrière la baie vitrée, "Tatouage de lumière sur ma peau dénudée"... je suis bien... Tranquille, avec ce texte je suis prêt à tout!... Gentiment bien sûr! Je vais sortir, je vais retourner chez ma mère chercher mes papiers, mettre de l'ordre dans ma tête pour demain... Demain! C'est peut-être important demain ce rendez-vous... et puis demain, je sais pas, peut-être je reviens chez Mireille, je sais pas... peut-être... demain...
Mireille elle me dit que si j'ai besoin d'un coin peinard je peux venir chez elle, d'ailleurs j'ai la clé mais je crois pas qu'on pense peinard pareil... Ça fait rien, je verrai... demain... Je me souviens plus bien ce que j'ai fait ce lendemain, j'ai préparé mon sac, mes papiers pour montrer mes oeuvres à la dame du rencard, je me suis bien lavé comme y faut, habillé propre et tout... "On" m'a dit que éventuellement si je suis prêt à tout c'est pas plus mal... avec la dame je veux dire... Bon, moi je sais pas mais je me mets quand même dans des conditions optimums, on sait jamais, faut pas arriver les chaussettes ou les oreilles sales ça ferait honte à ma mère et moi je suis un bon fils bien poli bien sage...
Comme il faut et crac! J'affiche le sourire 52 bis, ponctuel, juste à l'heure je sonne, "Dring!"... Et voilà une espèce de lutine à lunette qui m'ouvre la porte avec un sourire valant largement le mien qui du coup baille idiot et me dit "Entrez donc, je suis la collaboratrice de Phillie Vande, je suis à vous tout de suite je suis occupée au téléphone"... De fait je m'avance dans l'entrée, je m'attendais pas à ça je me dis tout net... Je reste debout comme un con grand avec ma saccoche qui bandouille à l'épaule... lourd c'est le cuir et le papier, et je regarde la lutine lutiner les téléphones, j'entends pas grand-chose ou je fais pas attention, c'était pas au programme, de toute façon j'ai comme une lézarde au plafonnier et j'aime pas les plafonniers... Je bouge pas... La lutine, Anne je crois, me fait signe d'entrer et de me poser... Je m'avance précautionneux... c'est un peu boxon dans l'appart, je pousse quelque revues et je m'assieds correct, ma chique coincée sous une molaire, c'est pour mes nerfs que je mastique, j'ai arrêté de fumer y'a 20 jours, et j'attends...
Au bout d'un moment les coups de téléphones se calment et la gentille collaboratrice me raconte que Phillie Vande est désolée mais qu'elle ne pourra pas être au rendez-vous fixé, "Un imprévu de dernière minute"... Ah bon je dis tout haut, dans ma tête je me dis un truc du genre bah voilà j'ai l'air de ce que je suis, j'ai plus qu'à aller dire bonjour Mireille et je verrai après... Retéléphone et tchi et tcha, et "Non Phillie n'est pas là, oui je lui laisse le message".... blablabla... Et voilà on discute un peu avec la lutine elle demande "Vous écrivez?" Oui je dis, des textes et des chansons et je sais plus quoi... Elle dit "Vous voulez une coupe de champagne"? Je rigole, je dis oui merci, elle part dans la cuisine et revient avec deux coupes, "Tchin!" Tchin! A la mienne je me fais, c'est mon anniversaire aujourd'hui c'est marrant, champagne!
On rediscute un peu plus, je raconte ma vie, elle raconte un peu la sienne, il y a du soleil qui rentre encore, ambiance agréable... Tout d'un coup clac! La porte qui s'ouvre sur une paire d'individus, 1 femelle 1 mâle ou l'inverse, et c'est la grande Phillie Vande elle même!... Présentations... "Je suis désolée, Anne vous a dit?" et blablabla... Ça devient tout de suite un peu dingue, babillage forcené, effets de voix, de genres, de poses, jurons appliqués, mimiques surexpressives... Grand Cinoche quoi!... Téléphone again, moi je bouge pas, je suis dans le fond bien calé sur un canapé rouge, y'a même la petite Pouff' à sa mère Phillie qui vient me dire bonjour caninement parlant...
Moi j'observe, c'est mon côté voyeur qui ressort... Ça va un peu dans tous les sens, le mec, j'ai pas bien compris qui c'est mais il a l'air de faire comme chez lui chez elle, se sert à boire du rosé c'est assorti à son teint... tu vois la classe!... Il cause aussi affecté que sa maîtresse mais là j'en rajoute... non?... pas vraiment... Ça fait un peu Cage aux Folles quand même, j'ai pas vu mais j'imagine facilement... Ça glousse un max, moi je vous le dis j'ai pas l'habitude trop, je sors presque de mon exil campagnard gratuit alors je me sens un peu pataud là céans tout de suite dans ce parisianisme branché... Ça doit être un pléonasme, à tout le moins un double néologisme... Je moufte pas lourd, on me cause je réponds, pas plus... Je trouve l'eau un peu fraîche à mon goût, je fais pas le malin... J'attends de voir...
Phillie téléphone même à mon contact, je veux dire la personne qui m'a obtenue l'entrevue... On se dit bonjour, on se dit ça va, elle me demande si je pense que ça va donner quelque-chose, je réponds évasif mais explicite, j'ai Phillie juste en face, j'abrège, on se dit au revoir... Je souris à la dame, au demeurant agréable la dame à regarder, genre grande, mince, stylée, brune, juste à peine quelques cheveux blancs pour le grain de sel, mais là je peux rien dire je suis servi aussi... Moi c'est un peu plus qu'un grain... Elle est plaisante la dame à voir, après ça doit pas être forcément évident mais là je suppute en mon tréfond libidineux, c'est complètement gratuit... Je bois un fond de porto ou de whisky je sais plus... Je sirote, à vrai dire c'est plus pour la contenance que le contenu... Ça dure un moment le manège, ils ont l'habitude, ça tourne rond, moi je m'y perds un peu...
Phillie parle au mec de manger... qu'ils nous emmènent et nous invitent au restaurant où ils s'étaient connus... de là je déduis, a/ que c'est son mec, b/ qu'on va manger ensemble, c/ qu'en fin de compte je suis peut-être pas venu pour rien, d/ que je verrai Mireille une autre fois... Ils parlent de noms de restaurants aux Halles, je sais pas quoi, ça doit être connu bien à la façon dont ils causent... Phillie dit à Anne la lutine collaboratrice de venir avec nous, elle répond elle téléphone chez elle pour prévenir pour le gamin, elle a un gamin elle m'a dit qu'elle assumait aussi... C'est bien j'avais répondu quoique assumer et assurer je comprends pas bien le sens dans l'ensemble du vocabulaire à la mode mais c'est pas mon problème pour l'instant, on va pas parler sémantique tout de suite comme ça à froid... Elle est mignonne la lutine, ça peut-être sympa cette histoire...
Phillie téléphone à un imprimeur belge, Anne à son mec qu'est pas son mec mais j'ai pas tout compris pour coucher le petit, et chacune y va de ses petits mensonges coutumiers de saison en ces latitudes professionnelles... Je me trompe, ce sont des ménagements de susceptibilité, pas des mensonges, en plus c'est inter-professionnel... J'exagère toujours! Je sais pas dire les choses, on me l'a déjà dit pourtant et voilà!... Tout le monde y est! Moi je téléphone pas j'ai l'habitude je me préviens jamais... et on sort tous ensemble, on descent l'escalier, on arrive en bas et on dit on y va à deux voitures, qu'on se suit... Moi je dis rien je suis à pied... Phillie va avec son mec, Michel je crois, moi je vais avec Anne lutine à lunette collaboratrice mignonne...
Je me sens assez bien, j'aime bien l'imprévu... pour l'instant c'est de l'imprévu tranquille, un peu fou mais gentil, on boit un coup, on mange un coup, on parle beaucoup et après on voit ce qui arrive... C'est ça que je me raconte en montant dans la voiture... Les autres démarrent, Anne démarre, ça pue le chat pisseux dans sa caisse, c'est pas la sienne mais le chat si, Anne cale, redémarre, recale, noie le moteur et me dit avec un regard évocateur et amusé "Y'a plus d'essence"....
Je rigole, je sais pas comment ça va finir mais je rigole, c'est préventif... Anne me dit qu'elle connaît un restau sympa juste à côté, je dis oui et les autres?... Elle me regarde et me fait une mimique du genre... "les autres!"... et ajoute qu'elle a pas vraiment envie de manger avec eux... J'opine prudent et me dis en ma bastide intérieure que ça va plus vite que je croyais l'imprévu, mais bon, c'est plutôt dans le sens agréable alors... Pourquoi pas?... Banco je dis, je viens pour la patronne et je repars avec la secrétaire! Faut le faire quand même!... J'aime le cocasse et c'est!...
Nous voilà sur le trottoir à marcher, les autres reviennent en marche arrière automobile, Anne en profite pour se glisser sous mon bras pour se cacher... Je joue le jeu, j'accepte l'offre et le risque, les autres repartent sans nous voir, on se regarde, on rigole et on s'embrasse... C'est mon anniversaire non? Si! Alors c'est le cadeau!... Resto bon genre 15ème, cocktail à l'abricot et champagne, poisson, vin, je sais pas quoi, sûrement entrée et dessert...
Elle me parle, me dit son "chéri", parle du milieu pub, artiste, dit qu'on se fait toujours enculer droit dans les yeux bleus derrière les carreaux.... Bien bleus, bien clairs les yeux, je rencontre que des yeux bleus ou verts ou pers ou je me souviens plus... Je soutiens le regard sans plus, pas de commentaire... Ça fait bizarre quand même cette petite lutine mignonne qui parle de se faire enculer à sec comme ça, j'ai presque l'impression de sentir l'ombre du pal et son supplice... Un léger froid dans l'épine dorsale là j'avoue, pas vous?...
Moi je raconte que j'en ai marre des chantiers divers ou d'été, menuiserie, brocanterie, maçonnerie plus drôle, alors si je peux vendre, me vendre, que ce soit un texte ou deux, une chanson ou les paroles ou la musique ce serait déjà pas mal... pour le pal, me faire enculer, j'imagine pas trop pour l'instant, faut préciser les termes... Je veux bien être un peu pute mais juste, pas plus, je veux voir d'abord...
Après l'indiscrète me raconte que Phillie la Grande avait plus trop envie de me voir en fait... en fait la dernière minute c'était du pipo... Il paraît même que "on" lui avait dit de se méfier à cause de ma gueule... elle a quoi ma gueule d'abord?... "Mon chéri", elle cause beaucoup... Elle sort sa carte de crédit et paie, elle a envie... Je laisse faire d'autant que je suis pas large en ce moment... Je cherche du boulot et mes principes chevaleresques commencent à être bougrement éculés depuis ma princesse charmante dernière et première réellement cotoyée...
Avant je plaçais les femmes sur un pied de légère supériorité, la finesse, l'intuition, la sensibilité, l'intelligence, la vivacité d'esprit, tout ça, avec une fragilité en plus, rien que du bon à se dévouer, à protéger, à vénérer... Là ma vénération elle a un peu la vérole... du coup j'ai mis les femmes sur un pied d'égalité avec l'homme masculin que je suis, c'est-à-dire tristement aussi connes que nous sommes cons les mecs, enfin pour ceux que je connais, dans le reste du monde y'en a sûrement qui échappent au générique de ma formulation sans doute assez sommaire mais je vais pas épiloguer là-dessus maintenant, c'est que j'ai pas fini mon histoire!... Travaille travaille mon fils!... Oui Papa!...
Bon, on sort du restaurant, on retourne à la bagnole, elle démarre du premier coup, brave petite, pas de problème, on vire pour chercher de l'essence, ça c'est vrai la jauge est à zéro... Bon, "On va où?"... Bonne question, pas chez son mec quand même!... Bon, allez! Chez ma mère!... Direction banlieue nord c'est moi qui pilote!... La maison est grande et je pense l'être un peu aussi et ma mère de même... Hier soir on a mangé ensemble, je voulais un petit "fils à mère" gentil tête-à-tête, mais son frère, mon oncle donc est venu traîner sa docte solitude à l'heure de l'apéritif... Râpé!...
Ce soir c'est râpé aussi, elle a mis le verrou, merde!... Elle a entendu et vient ouvrir, "Bonsoir mon pet..." ... Silence... "Je te présente Anne... Anne ma mère"... "Enchantée - Bonsoir Madame"... à moi, "Je vais me recoucher"... Un peu sèche ma mère, tant pis c'est plus l'heure... Je monte avec Anne dans la chambre que j'occupe depuis plus d'un mois...
"Mon chéri" elle dit tout le temps, "Mon chéri", moi ça m'agace... Je lui ai dit dans la voiture que j'aimais pas bien qu'elle m'appelle 'mon chéri', elle m'a répondu "oui mon chéri" avec un grand sourire et pan! dans les dents... Première leçon... Ok je dis, t'as raison, tu fais comme tu veux je fais pareil! Ça roule!... "Ma chérie!"...
Là on est sur le lit, c'est le moment de vérité, l'heure du plongeon, faut se jeter à l'eau, après on voit si on nage... "Doucement" elle me dit... Deuxième leçon... Elle a raison encore cette lutine sans lunette cette fois... Doucement... Elle a raison, je vais essayer de faire doucement, d'oublier le bestial brutal, le coït primaire et furieux du bouc en rut, du soudard pilleur et sabreur, du guerrier féroce, du corsaire pourfendeur de mères lointaines!... Doucement... Et ça ira bien cette fois, pas honorable, bien...
On fera l'amour deux ou trois fois, je sais pas, 'on' fait toujours l'amour deux ou trois fois... Ça dépend comment et avec qui, c'est jamais deux ou trois fois... On fera l'amour, c'est-à-dire qu'on se fera pas mal, déjà c'est extraordinaire! Pas se faire de mal, pas se défoncer, pas s'anéantir, pas se violenter... c'est pas sans force mais c'est nouveau, c'est sans mal, c'est bien...
Déjà l'automatique noir ou blanc, mal ou bien... Si c'est pas mal c'est bien, si c'est pas noir c'est blanc!... Moi je dis gris, assez clair le gris, sans mal oui, pas sans douleur, c'est le moins pire que j'ai vécu... ou je me souviens plus, c'est bien possible aussi, quand on y repense les occultations sont souvent surprenantes... "Occulte c'est le printemps!"...
Enfin pour moi c'est bien mais j'ai mal au pubis, des fois c'est ailleurs... Nouveau comme sensation, c'est quoi la référence?... Avant ce jour moi mec je n'étais que couilles et pénis, de pubis point... Je veux dire la perception physique, le contact, je découvre... Anne m'offre mon pubis... et le sien... Merci!...
Déjà avec ma princesse j'avais découvert l'insondable des sentiments contradictoires et le plaisir, terrible cette insondabilité et incompressibilité des sentiments, et violent le plaisir! Incontournable et surprenante force du plaisir, à vous transporter, à vous arracher des cris, à vous incontrôler!... Plaisir sans équivoque... mais pas les sentiments... Et c'était nouveau aussi... Avant je n'étais qu'un gland, je baisais, je lapinais, érection éjaculation, gymnastique, une-deux une-deux!... Comme à l'école!... Dugland soi-même!...
J'exagère encore, je caricature ou force l'innarration... Pardonnez-moi gentes et jeunes damoiselles, belles de jour ou de nuit... J'ai la focalisation un peu sauvage pour ne pas dire sanglante... Toujours un peu frustrant cette précocité, cette maladive peur d'être englouti ou d'y perdre le bout ou encore d'enfanter... ou de jouir de mes facultés!... Sûrement la peur d'être découvert aussi, mais là... A l'entrée déjà c'est ma mère, même si pas ravie, qui a ouvert la porte... alors... Caution Magique... Je sais pas, sommeil...
Matin! Le réveil le travail!... Elle travaille justement, elle téléphone à sa patronne qui lui répond qu'elle a intérêt à être à son boulot vite fait!... Elle a pas dû apprécier hier soir la Phillie Tatie... Bon, moi je joue les utilités, sur la touche je me mets, je fais celui qu'a rien vu, je fais chauffeur, je ramène la lutine à la Défense, c'est là qu'elle bosse... Bizarre cette rencontre, qu'est-ce que je fais moi?... Je me pose encore des questions sur l'histoire, cette nuit m'étonne, me prend au dépourvu...
Il fait soleil, je me siffle un air mien, plutôt sympathique et guilleret et j'arrive à la Défense... C'est la première fois que je rentre dans le monstre et ses entrailles souterraines... J'accompagne Anne à son bureau dans un de ces grattes-choses élevés à la gloire des mégalonarques qui nous projettent dans la poubelle avenir et perspectives immobilières, tout va bien pour eux merci!... Les bureaux c'est des rectangles avec une porte et une fenêtre, verre fumé, frime, air-conditionné non optionnel, si t'as des sous tu pousses la cloison d'un cran et t'as deux fenêtres et la place d'étendre les guibolles! Super!... Anne débranche le répondeur et m'offre un café au distributeur 'taumatique de service...
Je cogite toujours sur le présent et je pense que je vais aller voir des copines à Montpellier samedi, j'ai vaguement promis d'y être et là d'un coup j'ai envie vraiment de prendre l'air!... Je dis comme ça, "on est mercredi, si tu veux venir avec moi on prend le train vendredi soir ou samedi matin, par le TGV c'est pas trop long"... Elle enregistre... Je téléphone à un vieux copain de la Pelouse juste à côté de l'Etoile et lui file rencard pour l'après-midi... C'est l'occasion, c'est pas loin, juste la grande avenue à remonter...
J'ai travaillé dans ce coin à mes débuts, la Grande Armée, à l'époque je croyais que j'allais manger le monde en me levant tôt et en travaillant dur... "Maître Charles" ils m'appelaient... mi plaisanterie mi je sais pas quoi... peut-être une relative élégance... J'avais le geste large et la parole aiguisée pour mon rôle de jeune premier armurier... Je gagnais bien ma vie aussi... Je portais haut les couleurs et ne baissais pas le drapeau!... Brave petit grognard... -Souvenirs ténus, sinon émus, de la Capitale-
En attendant on va manger ensemble avec Anne dans "Le Village"... La Défense c'est bureau frime maxi, c'est maquillages, parfums, tralalas, devantures attrayantes et tout, plastique gadget... Le restau c'est pareil, style "Terroir Chic à Paris"... "Vous prendrez l'apéritif?"... demande le serveur néo stylé, "Une coupe" qu'elle dit, "Deux" je fais, champagne again... Elle parle de chez elle, son pays dans le sud, le foie gras, les conflits, les confits pardon, les champignons... Moi je connais pas tout ça, à part les champignons et les conflits bien sûr mais je suis plus très sûr de l'origine de ce lapsus, c'est sans doute la dyslexie du dactylographe incertain...
On mange, elle paie encore, chéquier cette fois, la carte a dû rester au restaurant hier soir... Chemin faisant elle me dit que sa bagnole à elle est au garage, qu'elle en a marre de bosser avec Phillie et qu'elle ferait bien un tour emmener son gamin chez sa grand-mère et venir avec moi à Montpellier, si je veux on part ce soir!... On est parti le soir un peu tard à cause du garagiste et de la carte de crédit oubliée au gastos... J'ai pas vu mon copain Philippe à l'accent rocailleusement chaud des environs de Rodez, il m'a attendu un moment encore... On a roulé jusqu'à Lyon avec sa Mini tape-cul et le petit derrière...
Maxime il s'appelle le petit, je précise pour qu'il y ait pas d'erreur... Le Maxime il m'a regardé un peu de biais quand même, faut dire qu'il avait sa mère pour lui tout seul depuis plus d'un an alors forcément quand à Lyon sa mère est venue se coucher avec moi il était pas jouasse le gosse... Moi je comprends bien, mais de ce fait on a pas eu une relation super lui et moi... Même après, quand j'ai eu l'occasion, je lui ai dit bien clair et gentiment entre quatre yeux que je voulais pas lui piquer "Sa" mère, je voyais bien qu'il avait pas confiance le Maxou... Tant pis... Il a quand même entendu, l'ombre d'un sourire esquissant une légère détente...
On est reparti de Lyon le lendemain, autoroute du sud, sortie Loriol, on passe par chez moi, maison mienne ardéchoise récupérer ma guitare de secours élémentaire, Clémentine elle s'appelle à cause de ma copine coquine chansonnesque... Je l'ai un peu abandonnée au profit d'une demie-caisse un peu jazz qui m'a tapé dans l'oeil un matin coup de coeur, d'oreilles, de doigts, de tête cette fin d'été passée, j'ai claqué mes dernières tunes et le reste pas loin... Mais bon celle-là elle est restée en zone pas risienne, je suis parti comme ça, la sacoche en cuir, les papiers, pas un calbute pas une guitare pas une brosse à dent... Rien! Comme ça je suis parti avec Anne et le Maxime!... Taïaut!...
"En route pour de nouvelles aventures!" Folies folies! Champagne, brumes alcoolifères, euphories bulleuses et aucune question! De l'air! Du vent! Du large!... Elle pour elle moi pour moi! Chacun dans sa tronche et ses problèmes!... Dans la mienne de tronche y'a déjà pas mal de monde, ça me fatigue, je reporte et ferme pour congés!... Elle je sais pas, je demande rien, c'est tel quel!... On arrive à Montpellier le jeudi soir, on dort chez la copine Domi après avoir bu mangé et discuté copieusement... Je vous passe la nuit... Très bonne la nuit... Côté physique la dynamique des fluides fonctionne vraiment bien, allez savoir pourquoi?... J'ai jamais bien compris la physique... Vendredi départ direction Toulouse, on va porter le Maxime à sa grand-mère bonne qui va le garder un moment...
Jolies routes de traverse pour rejoindre St Pons en passant par Olargues et son pont du Diable... Nouveaux paysages, je découvre... Anne veut liquider sur Paris, sûrement c'est pas plus mal pour lui, pour elle je sais pas... On revient le samedi et c'est la fête à Lucille! Son anniversaire, le mien c'est déjà fait et je m'en fous en fait de ces ranimages de flamme célébrant le jour de lumière première... Moi cette lumière je suis pas si sûr qu'elle m'ait plu au premier contact, alors si je dois célébrer quelque chose, que ce soit le moment qui passe! La fête c'est chaque instant! C'est pas le relevé annuel des compteurs officiants tamponnés à la naissance!...
Petit restaurant dans le quartier derrière la gare, on est au moins une dizaine tassés dans un coin, moi en bout de table, j'ai amené la guitare... Apéritifs, on mange on boit, ça discute un peu partout, on est pas les seuls... C'est samedi et sa ferveur noctambule hebdomadaire, on mange on boit, les abattoirs abattent, les fonctionnaires fonctionnent, le raisin raisine, les beaufs bouffent, large ambiance... (on est tous un peu beauf aussi...) Musique guitare chansons, je chante je joue je bois aussi bien sûr, mais je chante pas mal, je chante fort et clair et beau aussi, ça passe bien, j'ai envie... "Champagne!" Pof! Pof! et allez! Folies Folies! Ça va être l'exorcisme!..
C'est marrant, la veille de la mort de mon père Domi était à Paris et je l'ai emmenée voir un copain vieux mien nous faire payer le champagne et tout et tout, boîte de nuit, boissons fortes, veillée d'arme, histoire ancienne... C'est en rentrant de cette soirée tard le matin mais assez tôt que j'ai vu mourir mon père... De plus d'air il est mort... A petits coups de respirations étriquées... Doucement, doucement... Un souffle léger, léger... Doucement doucement... Plus rien... Si, léger, léger, une respiration sporadique... plus rien... Une remontée lente, une inspiration douce, à peine à peine... Plus rien... Une expiration profonde et sourde qui n'en finit pas... Encore une... Plus rien... Une suspension dans l'immensité de l'instant... Plus rien... Plus rien... Plus rien qu'un silence mauve...
Je sais pas ce que je chante avec ça dans le crâne ou le coeur, sûrement un truc émouvant... et je bois du champagne avec Domi... C'est quelque chose quand même tout ça!...
On finit par vider la cave du restau et on repart!... On est je sais pas combien ni dans quel état, plusieurs voitures encore mais là on se suit, ça roule! Même en sens interdit ça roule! Et même qu'y paraît que je conduis! Là franchement je trouve qu'il y a de l'abus! Ça se fait pas... pas saoul... inconscient je veux dire... faut assurer quand même!... On assure, on arrive dans un café face à la gare, on reboit un coup genre digestif mentholé et glacé, je bois comme Anne, je parle avec un copain des copines, il me gonfle ce mec avec ses histoires, ses platitudes d'excuses familiales et sociales, je commence à le jeter méchant... mais bon, c'est des blagues tout ça! Je galèje, je gabe, on est dans le Midi... té vé!...
Voilà, on s'en va direction boîte de nuit! Ça c'est une bonne idée à cette heure! Il est tard, il est plus de 0,80gr, ça c'est sûr!... Petit cortège lumineux de voitures déhambulantes dans la nuit... Boâte de nuit dans un coin paumé... Vaï vaï vaï! Bouger danser boire suer, folie-logie... Joli les lumières!... Ça tourne ça vire ça volte, je cavale dans tous les coins, dans tous les sens, je saute je vais je viens, je secousse je transe en danse, j'exorcise... Y'a Anne qui me suit partout, en fait je crois que j'ai envie de plus rien, de plus d'elle, de plus de tout ce délire mais bon, la machine est lancée et c'est une lutine, faut pas oublier!... Elle aussi doit avoir à oublier... On reboit du mentholé alcoolique glaçonné, fait chaud!...
Domi vient me dire qu'il y a une fille à raccompagner, c'est moi qui ai les clés de la voiture, je saute sur l'occasion... Anne suit toujours et voilà, direction St Georges, elle est pas drôle la fille, genre angoisse chiante, elle croit que je suis saoul... N'importe quoi!... Anne lui explique que je conduis toujours comme ça, à droite, bien serré, ras le fossé... Elle aime pas l'autre, elle voudrait prendre le volant mais je tiens bon, elle serre les fesses, ça s'entend... On la ramène quand même en état, on bois un café offert du bout des lèvres et d'une politesse lointaine et coincée... Et on repart chercher Domi dans cette boîte...
Je vais pas la trouver cette boîte de merde! Rien à faire!... pas cap... Je tourne autour, j'ai pas fait gaffe à l'aller... Paumé... Tant pis on rentre... Domi arrive un peu après raccompagnée par Lucille, tout va bien on est tous sauf c'est le principal... Sommeil!... Lendemain vasif, café amer, je me rappelle pas, sauf un truc... On a pris un bain Anne et moi et elle me demande si je me souviens de ce que je lui ai dit la veille... Je la regarde automatique et sans réfléchir je dis oui, "Te faire un enfant", sans hésitation et dans le blanc des yeux... Bonne réponse! Banco je dis... Exorcisme exorcisme... Je sais pas... Je dis je veux pas le faire pour moi ni pour toi, je veux le faire pour lui... et puis je sais pas, d'ailleurs je lui dis, "Je Sais Pas!"...
Plus tard je suis allé m'acheter un jean et une chemise du même genre, assorti western merdeux, go west si tu veux, et c'est là que j'ai commencé à plus mettre de culotte, d'où l'expression: "Ah le salop il a pas de culot!"... C'est des soucis tout ça surtout que bon, vous me comprenez?... Oui! Je savais bien! C'est merveilleux! C'est... Merci!... Faut vous dire que j'avais un pantalon crème et une chemise dans les tons clairs aussi, alors après la fiesta, le pantalon il est crême fouettée et la chemise dans le clair-obscur... le slip j'en parle pas, d'abord c'est pas littéraire, le calbute rebute c'est bien connu...
On reste encore un peu chez Domi et on décide de partir... On sait pas pourquoi, si en fait on en a marre... de quoi? Bonne question... Pas de réponse?... Je sais pas... C'est d'un accord commun que nous reprenons la route à l'envers, voyage retour, plus doucement cette fois, comme si je savais que c'était la fin de quelque chose, comme si, comme les enfants, comme si, on fait comme si... En fait je sais pas, c'est quoi le début?... Le début c'est Afrique et Afrique c'est moi alors on est pas sorti de la berge! Installez-vous confortablement, je fais pareil...
L'Austin Mini ancien model par contre c'est pas ça, j'ai les reins dans un état je vous dis pas! Ça fait rien on roule par les petites routes de France jolies pittoresques et cahoteuses évidemment... C'est joli c'est vrai, y fait beau ce mars là... On arrive par les gorges ardéchoises et ses sinuosités, on repasse chez moi, ça fait une halte... Je dis bonjour aux voisins, je nous invite en bas chez Broc'family et petite soirée tranquille tchachi tchacha agréable... TVB. On se dit à plus et via!
En route! Je te présente des copains, tu me présentes des copains, je te présente des copains, tu me présentes des copains... Lyon, Vienne, c'est à l'envers, on remonte Vienne Lyon dans l'ordre d'apparition géographique... C'est quand même pas l'ambiance sud-américaine tout ça, avec les cassettes merdiques en fin de soirée pour faire danser le tango justement à des sud-américains parents d'un autre copain présent à l'exhibition...
Pas flambant le tangage argentin j'ai trouvé mais c'est peut-être que j'ai pas de feu à l'intérieur, peut-être j'ai pas de feu du tout ou j'en ai marre du spectacle... Peut-être aussi de cette représentation permanente où chacun y va de son petit bout de rôle, du mime hara-kiri blanc, pas drôle, aux parents exotiques souriants mais fatigués, et puis les autres, tous les autres, les figurants, les remplaçants, les aspirants, les doublures et moi dans la tapisserie, je brode je brode... "Allez! Bises à tous!" Tchao pantins!
Bonjour Paname en lacets et quoi?... Merdouillis merdouillat un peu partout à droite à gauche... Retour à la case départ, je ramène Anne dormir chez ma mère qui brave femme me fait remarquer gentiment que chez elle c'est pas un hôtel... Ok je dis, c'est clair. Je vais faire au mieux pour partir le plus vite... C'est pour la fille qu'elle dit ça ma mère vous pensez bien...
"Une fille facile faut se méfier quand même" elle me dit, moi correct je réponds pas que je suis aussi un garçon facile, je fais pas dans l'insolence, j'ai ma dose... Je pense j'ai rien à dire, je pense j'ai qu'à partir, j'ai jamais pu m'installer dans cette baraque, y'a pas de raison que ça change!... Je trie les affaires qui me reste ici en premier et puis celles du père si je peux, j'ai promis de le faire, et je me tire! "On liquide et on s'en va" je pense, Point final!...
Ça se fera pas si net ni si vite et tout et tout... Vous connaissez peut-être?...
Carte chance! Au téléphone un voisin me dit que je peux aller bosser chez l'expert auto en haut de la côte pour répondre au téléphone, je prends ou je laisse mais c'est tout de suite la réponse... "J'y vais" je fais... C'est un peu avant la tirade de ma mère, y'a Anne qui est au lit je lui dis "Urgence je vais bosser!"... Du travail! La manne céleste! N'importe quoi mais du boulot! Ouf!... Ça va faire trois sous et ça va m'occuper la tête... Anne s'en va, je monte la rue verte et au travail...
Quinze jours quand même je bosse là! C'est un boulot de serpillière je fais à répondre au téléphone, j'essaye de m'en sortir en y mettant du mien, en étant pas trop con mais c'est pas possible! Se faire tordre comme ça entre les clients qui râlent à raison et le patron qui se prend pour Dieu le Père, y'a que lui qui sait, c'est pas possible! Petite pièce sur l'enclume, "Ping! Ping!" C'est les marteaux qui tombent! J'ai pas l'habitude de me faire taper dessus sans rien dire, pas au noir, pas au Smic! Et ça me bouffe la tête!... La nuit je réponds au téléphone, je rêve sonneries, dossiers, archivages... STOP! Je dis je m'occupe de mes affaires, j'ai suffisamment de boxon à trier chez ma mère pour faire en plus celui des autres! Je prétexte poliment et je me tire, Hop-là!... Prétexte prétexte... Vite dit!...
Du coup je plonge dans le merdier succession, paperasses, démarches, administrations, renseignements... Héritage! Notaire évasif à l'extrême, constat horrifique des effets secondaires du contrat de mariage de nos parents, on leur avait pourtant demandé avec ma soeurette si tout était prévu au cas ou... Oui ils avaient dit... Tu parles!... Le grand racket étatique! Encore une belle arnaque!... Frais de succession, évaluation de l'actif, marchands de bien aussi vautours et retords que possible... Impôts, mairie, équipement... Démerde toi!... La curée légale... Toute une humanité!...
Le tri des affaires du père, ranger tout, faire propre, nettoyer, brûler les vieux papiers et le reste, et le courrier et les bulletins de santé, les radiographies par paquets de dix, et les vieux dentiers, les photos, les "Bonnes Fête Papa" écolières éculées et jaunies de toute la fratrie, les bulletins scolaires et les bons devoirs (rare) "Seul le vent est libre"... C'est pas de moi ça, non moi j'ai tout foutu en l'air en gros et en vrac, dans le détail il en restera toujours cent fois trop mais Ho!... J'ai ma dose, j'en laisse pour les autres!...
Je fais ça la journée, j'ai de quoi à plein temps! La maison est grande et y'a trois générations de laissés pour compte... Le soir si je peux je sors ou je lis, je découvre Cavanna et les Ritals, c'est pas un salop Cavanna! Y me rend des billes que j'avais perdues vers 12 ans, ça fait du bien... Ma mère se fait de la compagnie avec son tricot et la télé ou la radio... Moi j'avoue je me sens pas trop de faire la causette, d'abord j'ai jamais causé alors je vais pas commencer, et la télé ça me gonfle et la radio aussi, donc l'essentiel je dis, les questions indispensables je pose, le minimum...
Moi j'ai tout dans la tête et le papier... Les cordes vocales je chante un peu avec mais je cause pas, non non... "J'fais l'tri dans l'courrier"... Ça c'était en Ardèche chez moi, ici chez ma mère c'est pareil... "Banlieue nord, banlieue sud, c'est débile!"... DIXIT!... Merci l'artiste!... Je me sens con et petit des fois, aussi minable qu'il se peut en cette humanité vaniteuse et suffisante... Homme mon frère... moi-même... Pas Vous?...
J'ai eu Mireille au téléphone, on s'est revu et la suite... Anne est repartie dans son sud, elle revient solder ses comptes parisiens, c'est pas tout gentil non plus avec l'ex-patronne... On se voit à l'hôtel quelquefois à Enghien, avec vue sur le lac... Classe! Ville d'eaux vieux siècle et bulles de champagne!... Rituel et carte de crédit... C'est Anne qui paie toujours, c'est son truc, elle a raison encore je suppose... 3ème leçon sans doute... Je veux dire elle paie ce qu'elle veut elle, c'est son prix à elle... elle paie, chacun son prix... Faut payer quand même, alors autant choisir... Moi j'écris, c'est "mon" prix, je paye... et j'ai pas fini de payer!...
Afrique!... Mireille... "Peut-être tes jambes à mon coup pour s'envoler"... Non, je lui ai pas dit... J'ai essayé pourtant avec une chanson, "Si je fais le bateau, tu fais la voile"... elle a aimé mais c'est pas allé plus loin... Cocagne!... on paiera chacun "nos silences"... quelques petits "dommages"... Je voulais dire que si on s'envole pas c'est pas la peine ou plutôt c'est pas la joie... Après c'est l'aveuglement idiot, c'est le mur de cécité, c'est la relation banale et beauf et conne même si on y met du sien, des senteurs d'algues marines sous la douche et de la bossa rue Mouffetard...
Après c'est le suicide copulaire attelé, le couple qui se jouit même pas, l'individu qui se je oui pas non plus. C'est même pas la masturbation c'est la misère sexuelle et le désert émotionnel des livres éducatifs... Le non-soie des chairs et du coeur, c'est la frime intelligente et compréhensive... C'est cette fausse compassion altruiste et gluante déguisant le sordide insidieux des jeux de pouvoir en coulisse... Un monde d'inconscient!... C'est -j'exagère- j'allais dire... 'Papa-Maman'... Je le dirai pas parceque je sais pas... On a jamais parlé non plus alors je me tais, ça je sais...
Avec Anne ça va, va savoir pourquoi?... Chimie chimie... On n'en parle pas non plus... Afrique! Quel texte quand même!... J'ai écris ça le 9 mars à Boulogne chez Mireille... Un instant de lumière, un moment fabuleux, moi et moi ensemble!... Magique!... Une source inépuisable!...
C'est Pâques, j'ai bien avancé le tri, pas trop dans ma tête... Y'a encore trop de monde, y'a tout qu'arrive ensemble... J'ai même pas encore réalisé ce que j'ai vécu en Ardèche ces dernières années avec ma princesse et notre couple conventionné post '70 base adultère, divorce, association, ruptures multiples et poète maudit... Moi en l'occurence... Alors le présent là maintenant je suis pas capable!... Je marche au coup à coup, automate au mieux sauce spaghettis!... Et je veux blesser personne... et je m'enfonce encore!...
Je fuis encore cette rencontre, ma rencontre, je suis pas cap'... "A qui je ressemble? Est-ce que c'est à moi?"... Encore une oeuvre suscitée par ce ménage révision des portraits de famille et un rayon de soleil bienfaiteur... Je sais pas, je suis encore un gosse, j'ai encore la trouille, alors je nettoie la merde que mon père a laissé et y'en a de la merde!...
Déjà c'était la maison de ses parents mais en plus il en a remis un max le père!... Récupérateur en diable le père, athée le père, ça peut toujours servir... Des centaines de kilos je sors à la main à la pelle, à la brouette, à la benne à gravats... Deux grandes bennes de merdailles! Du solide je parle, du plomb, du fer, de la fonte, du cuivre. Le reste, le léger, je le brûle. Tout ce qui peut brûler je brûle. J'ai même pas besoin de rallumer le feu tellement ça braise!... Ça couve un max aussi... et ça repart tout seul le lendemain... Auto combustion ! Auto allumage !... Génial !
Plusieurs jours je brûle, je brûle même un meuble à moi en chêne avec tous ses tiroirs... Marre des tiroirs des meubles et des déménagements, des ménagements des regrets éternels aussi j'ai marre... On ménage on ménage, on famille on famille!... On dit rien pour pas faire de peine, on enlève juste la merde qui déborde, avec des gants bien sûr, mais pas plus, on touche pas au reste!... La merde c'est caca, la merde c'est sale d'abord et si c'est sale c'est sale et quand c'est sale on a peur de se salir!... C'est vrai la merde c'est la merde, c'est comme la boue, c'est sale ça salit, ça souille...
Ça use aussi... Je me suis déglingué une articulation dans l'histoire, la hanche gauche à force de forcer... C'est quoi l'histoire?... Le petit vidangeur masqué?... ou l'apprenti imprudent de la dent dure qui se démolit le dos les jambes et les pieds en essayant de résister à l'équarrissage pré professionnel?... Les pieds plats en trois ans de rechignage, trois ans de trouille, trois ans de merde, trois ans de mort... Seule la morgue au point du jour à Austerlitz sans le soleil pour sortir de terre, pour respirer un coup, pour voir... Quoi?... Quel horizon?... Les maux maîtres... Des excuses?... Quelle guitare?... Comment ça ça pue la merde?... La couche culotte?...
Je reprends... Afrique, Mireille, Anne, mes parents et moi je suis sous la douche, je me lave la tête et le reste... Je frotte, je récure un segment d'histoire, une fraction, une parcelle et encore des fragments... D'innombrables morceaux incertains d'un gigantesque puzzle... Je remets cent balles dans la machine à mémoire... J'y peux même rien, ça ressort à ressort tout seul...
J'ai presque fini. La maison est à peu près propre en ce qui me concerne, à peu près... Je vais laisser ma mère et Mireille, j'ai besoin de vacances... Je vais voir Anne dans ce coin du sud que je connais pas, où il y a des arbres grands magnifiques!... C'est des êtres comme j'ai jamais vu, c'est beau les êtres, c'est haut, puissant! Ça s'élance vers le ciel sans vergogne! Ça relativise nos arrogances l'être... Ça m'impressionne vraiment ces êtres, même avec un H devant pour l'orthodoxie... Ce sont vraiment des êtres ces hêtres!... Coupez pas!...
J'ai toujours beaucoup aimé les arbres et dans ce coin y'en a plein... Je me casse pas le tronc là-bas, c'est des copains à Anne qui nous hébergent... Tranquille, on parle de tout, de rien, cheval musique, je passe le temps, je fais du feu... J'aime bien faire du feu, c'est magique le feu aussi... ça apaise... Je commence à courir comme ça, pour rien, j'ai envie je cours... Y'a des chevaux à côté, je les regarde ils me regardent, on galope ensemble, chacun de son côté de barrière... Moi ça fait un peu cheval de labour mais ça fait rien, "laboure, toujours laboure!"... J'ai les bronches qui respirent un peu, ça fait du bien, j'y vais doucement... Y'a encore de la brume, j'ai plein de travail encore!... Je repars, j'ai la bougeotte...
Anne m'a reparlé pour l'enfant, j'ai dis que je voulais pas vivre avec elle et que l'enfant je le fais pas pour moi ni pour elle mais pour lui, pour l'appel de la vie à elle-même!... pas plus... Ça me rappelle "le Prophète", Khalil Gibran... Superbe transcendance de poésie!... En fait je sais pas pourquoi je lui ai dit ça à cette soirée exorcisme... J'ai dû sentir le possible, je la connaissais pas en dehors de cette espèce de douce folie de ces trois ou quatre jours passés... Alors quoi?... Reproduction de l'espèce de tête de que je suis?... L'éthyle est-il la raison de ce delirium épais?... Ou un absurde pied de nez?...
Quand mon père est mort j'ai dit à ma mère que peut-être je ferai un enfant un jour... Elle m'a répondu peut-être un garçon... J'ai répondu peut-être... Elle a dit un petit Pierre... Là j'ai pas répondu comme j'ai pu... Pierre c'est le prénom de mon père, son mari à elle donc, c'était trop pour moi! J'ai pas pu dire non tout net, j'aurai dû! J'ai pas envie d'appeler un gosse Pierre, si je dois charger le sac d'un môme j'y poserai une plume, pas une pierre! Pas mon père, ça suffit le cirque!...
Et voilà, je me promène sur les routes avec ça dans la tête et le reste dans mon dos... Moi mon pré non c'est un grand-père à ma mère je porte, un menuisier je crois... Ça pèse lourd un menuisier? Ça fait rien, j'avance... Mireille je la reverrai pas dans cette histoire... J'irai récupérer ma guitare chez elle une fois... On se recroisera 2 ou 3 fois mais pas dans le bon sens et c'est cartes postales... J'avais laissé la clé aussi... Banal...
C'est presque l'été, j'ai envie d'Afrique, de chaleur de soleil... Je suis retourné à Paris, banlieue blues, pour des histoires ma mère et notaire mais je décroche!... Je suis chez moi en Ardèche et c'est les grandes manoeuvres cailloutesques!... Je remue le basalte comme un forcené!... Je fais le tri chez moi un peu plus du coup... Je veux pas laisser traîner trop de merde... c'est pas la peine d'accumuler je me dis, j'essaye de faire propre dedans dehors, pas facile facile... "L'eau coule en ma mémoire, je dois retrouver, l'aval en amont, les fleuves peuvent s'arrêter"...
C'est toujours Afrique. Je cherche l'eau dans ma mémoire, je cherche ce nectar, ce miel du 9 mars. Je dois retrouver, je cherche en amont... C'est grand, c'est impressionnant, c'est surprenant, déroutant, bouleversant même je dirais... Je me sens lourd pataud, j'avance lentement, péniblement... Ça colle, ça glue tous ces sentiments mélangés... L'amont c'est avant, c'est ce qui précède, c'est moi depuis le début, c'est moi je dois retrouver, la naissance, c'est ça ! Ma mémoire propre, mon aval... J'en avale des cailloux, des couleuvres, des vipères... C'est un peu obsessionnel, j'envois paître un peu tout l'entourage... "Faites pas chier!"...
Je repars... Montpellier, Domi, Mazamet, Anne, Toulouse, moi... J'avais envie d'y faire un tour à Toulouse... J'arrive par le train, j'ai le barda, la tenue complète, la sacoche en cuir, la guitare, le sac à fringues... C'est pas possible! Je cherche un hôtel, c'est 4h de l'après-midi, un petit hôtel, une petite piaule sous les toits, c'est 80 balles déjà!... Il fait chaud, c'est fin juin... Je regarde cette piaule, une vague armoire, un lit double, une tablounette de rien du tout, un lavabo, un bidet, une fenêtre à ras le sol sous la pente du toit... et voilà, je retrouve ma piaule en Ardèche comme je la voulais au départ!
Simple, dépouillée à l'extrême, utilité fonctionnelle, pas chiante, pas lourde, pas accaparante... Et je pense à ce travail de titan forçat que j'ai fait avec ma princesse déguisée en arpète modèle pour transformer une chose simple et belle en "maison mon cul"! Pas vilaine quand même, mais pas simple du tout, complexe isolant oblige, catalogo-logie, pas simple, pas simple... "Quand le bâtiment va tout va!"... Merci Monsieur le Sinistre!...
Allez! Je vais piétonner dans la ville, découvrir, me changer les idées... Je marche, j'aime bien marcher le nez en l'air ou pas, les mains dans les poches ou pas, mais sans bagage, les épaules libres et légères si possible... Je marche Toulouse, le Capitole me branche pas, je préfère les petites rues et autres curiosités... Le Capitole c'est trop mastoc je trouve mais chacun son nougat...
Toulouse bien, j'ai bonne fatigue dans les pieds, ça veut dire j'ai mal... Trop marché sur le dur avec mes semelles finettes de mocassins légers genre indien jolis... Je retourne à l'hôtel cette chambre m'attire... Je me déshabille, je m'étends sur le lit, nu, la fenêtre ouverte sur les toits et la chaleur... ouvert aux vents qui soufflent dans ma tête... Toutes ces histoires, ces paroles, ces visages, ces odeurs, ces musiques, ce défilé ininterrompu... Ce ruban fabuleux de toutes les couleurs jusqu'à l'oubli...
C'est le matin, j'ai bien dormi, j'ai rêvé fort, je me sens reposé... Je me lève, me lave, m'habille me charge et décanille... Pas tous les jours l'hôtel! Je peux pas... Je reprends le chemin de la gare et j'arrive au canal... Je m'arrête, je regarde l'écluse, des bateaux passent direction Sète... Merde! J'aurais dû leur demander de m'emmener je pense trop tard... Il fait beau, je vais faire du stop... et là je réalise mon encombrement!... Je réalise aussi que je veux vivre de ce qui me plaît, pour l'heure écriture et chansons et de ce fait il faut que je trouve un moyen pas sordide de m'en sortir à moindre frais... et toc! Un cheval galope dans ma tête et ça y est! Une roulotte!...
Je pense un lit à roulettes, un cheval et moi léger, ça devrait aller... Les petites routes, la campagne, les villages... De toute façon les villes sont surchargées de musiciens et autres mancheux de tous types... Les sous?... Simple, évident, lumineux! Je vends ma baraque et le tour est joué! Je demande rien à personne et cette maisonnée commence à m'indisposer sérieux! J'ai plus grand-chose à y faire, les moutons moutonnent sur les ondes disponnibles, les "Bidochons" bidochent à la campagne, je cause à personne!... Tout seul je me le fais ce coup là!... Pas d'Papa pas d'Maman, pas d'soeurette pas d'copain pas d'copine! Tout seul!... Autonome je veux être, indépendant et fier comme un p'tit banc! Ma guitare rapière sous le bras Cyrano n'a qu'à bien se tenir! J'ai presque le tarin en avant!...
J'ai quand même traîné mes sacs et ma guitare un bon moment... Une voiture me sort de la ville et me largue sous un carrefour à l'entrée d'une autoroute... Pas super le spot pour le stop... Je reprends mon bât et clopine sur le côté bas... C'est plein midi, ça cogne fort sur la tête déjà que...
J'arrive sur la nationale un peu plus loin, je trouve un coin bien dégagé, je m'installe la guitare racoleuse juste ce qu'il faut et allez! Le pouce en l'air bien haut bien net!... Ça va mieux, une voiture s'arrête, le monsieur passe par Montpellier parfait! Il a l'air sympa, il m'ouvre le coffre pour ranger mes affaires, rien à dire sur l'accueil, bonne maison! Ça roule!...
On discute musique travail, couple enfants, déshydratation (ça tombe bien j'ai soif!) équilibre, franc-maçonnerie, l'homme la femme, la terre le ciel, le père la mère, tout ça!... On ratisse très large!... Des fois c'est un peu curieux comme dialogue mais j'ai pas noté, lui il me dit qu'il est franc-maçon, je m'en doutais un peu... Moi je réponds mon projet de roulotte, mon écriture...
Arrivé à Montpellier je lui offre un de mes bouquins, j'en avais dans mon sac. Il me dit merci, moi aussi et voilà, je suis à côté de chez Domi! Bonne journée pour un stoppeur! Toulouse Montpellier en 2 étapes, moi je suis content! Faut dire que le stop et moi on était pas trop copains jusqu'à ces derniers temps. à l'époque de ma jeunesse stoppeuse je marchais plus que je n'arrêtais de voitures... C'est excellent pour les guibolles mais pas forcément pour le moral, surtout adolescent...
Je dors chez Domi, on discute encore... Je raconte mes dernières élucubrations et je rentre sur l'Ardèche via Montélimar... Domi me dépose à 7h du mat' à la sortie nord de la ville et stop again!... C'est marrant les gens dans leurs voitures, on dirait qu'ils ont peur rien qu'à me voir comme si j'allais les mordre!... Non, moi je souris, et grand en plus!... Offert que je suis au bon vouloir...
Y'en a plein qui font des mimiques du genre "Je m'arrête pas loin", le mime des excuses merdouilleuses... Y'a des agressifs aussi, chien de défense, autocollant "tape-dur" et "la France aux François!"... C'est à la mode en ce moment mais vous aviez sûrement remarqué... C'est un Espagnol qui m'emmène jusqu'à Nîmes, il va donner le biberon à sa fille chez ses beaux-parents... Bon... Nîmes en stop c'est pas gai gai, c'est même rudement kaki et le kaki ça a pas l'air d'aimer le stoppeur... C'est un Africain du nord deuxième génération qui me sort de là... Il est sympa, dommage il va pas loin mais pas loin c'est déjà bien... Je vais pas tout vous raconter hein?... Non d'accord...
Montélimar, 4 heures de l'après-midi!... 150 bornes ça fait en 9 heures... Pas d'excès de vitesse! J'ai évité l'insolation de justesse sur un bord de route déplatané... J'arrive, je pose mes affaires chez ma soeur, je sais pas pourquoi j'allume une Craven sans filtre, y'en a dans une boîte... Je goûte... c'est bon, parfumé, savoureux, riche, plein, épicé... un rien sucré... Goûteux quoi!... Je déguste une demie cigarette et basta! Plus envie, j'écrase...
Va et vient l'Ardèche, ma soeur me prête sa caisse et voilà, le lendemain je reviens en ville avec une photo de mon palace et hop! Dans une agence je mets! Je demande 70.000, on s'entend sur 90.000... Moi je veux vendre vite, je me sens déjà plus léger, j'entends presque les sabots du cheval... Je remonte au hameau, je fais le tour des voisins. Je bats la campagne gentiment, tambour de brousse, annonce amicale de vente à 70.000 à 50.000 je laisse... Cinq briques, des vieilles, si ça leur dit... Personne répond, enfin "peut-être pour un copain, t'es con de vendre"...
Le lendemain Philippe le voisin vient et me demande si c'est bon à 5 briques, oui je dis, "J'achète!" y dit "t'es sûr?" je fais, ouais y dit, "Tope là!" je fais et on fait comme dans les vieux films, on se tape la main comme en vrai, comme des grands, on a conclu une affaire!... Je l'invite à venir s'assurer des lieux, qu'il se rende compte, c'est petit quand même, ils sont trois eux... Bon ça va, on tchatche et "Dring!" téléphone...
C'est Anne qui me dit qu'elle est enceinte, "ah bon" je fais, elle me dit que j'ai pas l'air enthousiaste, je lui dis que je suis complètement dans autre chose là tout de suite, je lui demande si elle est contente, "Ra-Vie!" elle dit, c'est le principal je dis, on se fait à bientôt et salut!...
Je retourne à Philippe et à cette affaire à faire... Ça devrait aller sans problème, tant mieux, "On fait au plus vite" je dis, il est d'accord c'est parfait... On attend lundi ou mardi pour l'accord de la banque et voilà!...
Voilà, c'est début juillet, après quelques péripéties voisinantes et gonflantes de "Je pensais pas, si j'avais su je te l'aurais achetée"... Le nez dans le caca y'a que ça qui marche!... Je signe le compromis promis initialement et je lance l'appel moutonnesque à demi pour fêter cette vente avec les copains et dire ce n'est qu'un au revoir à tout le monde et à ce temps de grandes manoeuvres sédentaires à terre...
J'ai la roulotte dans la tête, j'ai envie d'espace, de mouvement, de nouveaux horizons, ceux-ci me paraissant un peu étriqués à l'heure actuelle, lors les délais de réalisation de l'acte étant d'au moins 3 semaines, je m'arrange avec des copains qui fournissent l'accueil et le demi mouton manquant pour cette fête estivale finale et j'espère point d'orgue non dissonant!...
Un peu coup de force quand même!... Car j'ai le sentiment et je vois bien que certains ne jugent pas très positivement mon changement de position... Mon largage multi azimut me semble déranger les us relationnels conventionnellement admis jusqu'alors... J'avais pourtant clignoté et averti et klaxonné que ce rôle m'ennuyait dans ma conduite intérieure trop étriquée... J'avais dit que mes épaules n'étaient pas aussi larges qu'on pouvait le supposer, mais comme dans l'histoire j'avais dû trop faire hurler le loup... alors on m'a pas cru... Bon chien, un peu grande gueule mais bon chien... "Trop fort la guitare, on entend pas les paroles"...
Donc un peu épreuve de force cet ovin, ce haut revoir tendu à la limite provocante de mes cordes vocalisant la césure et l'union à d'autres mondes... Autre monde, Anne m'a demandé pour venir, j'ai dit oui si tu veux mais je serai pas trop disponible... Y'a ma mère qui débarque aussi, coïncidence rare, donc je l'invite sans détour... Heureusement! Dans l'affrontement amical on me dit que si je l'invite pas c'est eux qui l'invitent... Ça tombe bien on est d'accord ça fera pas un conflit de plus... Paix mes frères... Y'a mon ex-cubine qui me demande si je l'invite, à moi ça me semblait évident, logique, mais j'avais pas formulé alors je formule et convie... Faut dire que dès qu'on s'éloigne un peu de l'habituelle photo de famille ça coince dans le cadre et le cadre grince...
Remarque moi je suis tendu aussi, j'ai le dos un peu raide, j'ai l'impression de manipuler de la nitroglycérine... Si ça choque ça pète! J'ai pas envie, je serre les fesses à mon tour, pas de flatulences intempestives!... J'ai mis la salopette chantier pour être à l'aise au cas où, en plus c'est joli bleu sur les photos! Ça peut pas se louper!... Bien vif le bleu, pas fluo, bleu j'ai dit, mais bien pigmenté, royal le bleu!... Y'a Freddy justement, photographe atypique et sympathique avec son matériel de prises de vues hautes en couleurs et la folie qui va avec, faut s'attendre à tout, surtout au flou artistique!... C'est comme ça qu'on s'est rencontré, avec quelques verres de vin, quelques paroles et chansons et une certaine ivresse dans l'osmose... Depuis on se voit souvent... Amitié amitié...
Piments blues, fumées de laurier, senteurs de cumin... c'est le mouton qui cuit, un peu vite... Cette fois j'évite de boire, je veux dire du vin, je bois de l'eau, pas de fausse sortie alcoolique, de l'eau!... C'est nouveau mais pas désagréable, au demeurant désaltérant l'eau... y'a une copine de Lyon qu'a débarqué, ça fait plaisir, G' de Montélo, Bruno en tube et en bretelles, Farid aussi... Ça fait quelques notes qui me réchauffent la transpiration, sympathies sympathies...
C'est curieux ces fêtes là, plusieurs à inviter, ça fait des mélanges parfois étonnants... Moi j'aime bien, je reconnais, ce rien de zeste de provocation aléatoire et hasardeuse, la rencontre incertaine des couleurs... Moi je vois ça un peu de loin, comme un touriste dans une expo.... Je fais le demi maître de cérémonie moutonnière avec le Dab'bèné va bèné cosi si... Le vin est pas terrible, tant pis, au troisième verre ça se sent moins... Correct, bonne tenue, la réception se termine gentiment, même tendrement à la fin avec Berty qui accepte ma guitare et vocalise quelques chaleurs siennes méditerranéennes...
Moi je suis plutôt banlieue nord mais j'ai dit déjà et chanté aussi, le jeu se calme, je me détends, j'avais écrit un texte juste la veille, ça commence par "Le quotidien est mort! Je l'ai tué hier!"... Je ferme mon bec et laisse battre l'inutile... Je finis par une chanson douce, "C'est rien mais ça fait chaud au coeur, un peu d'tendresse de temps en temps"... L'heure est au coeur ce 1er Août, pas à la provocation... Allez, au dodo!... Chacun se rentre chez soi avec sa coquille sous le bras, je raccompagne Freddy, au revoir tranquille... Je suis sobre, on remonte chez moi dormir avec Anne et la Sistoune de Lyon...
Anne repart le lendemain, Sistoune le matin d'après... Je souffle un coup! J'ai besoin... Maintenant c'est la dernière ligne droite pour la baraque, le dernier déménagement... Le minimum, j'emmène les fringues dont j'ai besoin, quelques bricoles, un vieux buffet que j'ai pas réussi à fourguer et voilà... Le reste je laisse!... C'est mon ancienne compagne qui m'aide, elle fait même du rab mais moi je veux plus le savoir tout ça... J'ai déjà assez donné depuis le début de l'année, c'est bon, j'ai besoin de rien!... J'attends la signature définitive pour rendre les clés et me tirer...
Je veux aller voir en Espagne pour la roulotte, en Andalousie vers Séville... Je récupère la vieille musette de mes seize ans, celle de mes longues marches sous le soleil du midi et de mes autres voyages imaginaires... Je réduis le volume bagage, je largue la vieille sacoche en cuir d'artisan pour un petit new-look en nylon, je prends juste un futal de rechange, une chemise et voilà!... La guitare est toujours là, je devrais lui mettre des roulettes ça me ferait un vélo... J'ai rencard avec Anne, elle a envie d'aller au Maroc et de passer par l'Espagne, moi j'ai dit oui c'est ma route...
Elle a l'air heureuse d'être enceinte, moi je suis content de la voir bien... Je me sens pas trop concerné, j'ai voulu faire un enfant... En fait je sais même pas... qui décide vraiment de quoi?... En tous cas c'était l'idée de l'enfant pour l'enfant, pas pour ses parents, l'enfant libre, la vie cadeau... Pressentiment improbable et incontournable... Je me sens pas père pour deux sous à cette heure, géniteur pas plus... Emetteur de vie, tu reçois tu reçois pas... Après c'est le discours et moi plus ça va plus ça me fatigue le discours! J'ai envie d'actes, même si fous...
Je sais ça peut sembler facile de dire ça pour un mec... Moi je voulais pas faire de gosse pour le mettre dans ce boxon merdeux plein de parents possessifs et castreurs, éleveurs de leur cheptel à eux rien que personnel, bien nourri c'est l'essentiel, belles bêtes, bien lavées, bien peignées... Allez mon troupeau... En route mauvaise troupe! Moi-même... Et puis l'école, élevage en série, le curé ou le camarade communiste, dieu ou diable?... De toute façon le gavage, la morale, le bien le mal, le sale le propre, le bon le méchant, le papa la maman...
Ça m'a coincé tout ça alors je voulais pas reproduire à mon tour... La mort de mon père m'a en quelque sorte délivré de ce complexe parental, la pairie la mairie, je sors de l'urne et me livre à la vie!... La vie c'est tout et rien, une ovule un spermatozoïde, le hasard des rencontres et la loterie de l'hérédité... Alors si ça veut je génère, je transmets le demi message vie, ADN, la chimie, mais je refuse la paternité et son reflet maternant...
... Maintenant, à l'heure incontrôlable de cette écriture, c'est le 1er février... Je suis à Lyon dans une roulotte imaginaire, je voyage immobile sur le vecteur amour, une autre dimension hors normes statutaires duales... J'ai envie d'être enceint de cet amour, de me faire un petit dedans moi, plein d'amour et de paix...
Le terme arrivé c'est l'accouchement inévitable et rassurant même si encore douloureux ou violent, la délivrance... Le petit que je porte il est à moi tant qu'intérieur, après... Je connais pas le délai de gestation, et si j'accouche, j'accouche de quoi? Un enfant? L'assistance publique recueille l'armée recrute... Des mots? C'est dépôt légal, recueil et assistance publique quand même!... Ça fait rien j'essaye...
Je ne peux accoucher que moi, générant ou générique, je n'accouche qu'un adulte mutant possible du moi-enfant re-généré, re-suscité. Je m'élève moi-même!... Peut-être!... Je me débrouille sans aucune certitude, surtout pas celle-là!... L'enfant qu'Anne va bientôt accoucher, je lui souhaite de vivre pleinement, comme à n'importe qui, moi je débute, j'ai juste un peu d'avance sur lui mais aucun avantage... - Egalité -
Retour arrière... Septembre, voyage au Maroc via Séville et retour par le Portugal... Sympa le Portugal... Anne se chope un début d'insolation en conduisant la voiture sous la canicule marocaine, elle est rouge cramoisi!... Je lui dis de s'arrêter, elle réalise pas, complètement abrutie par la chaleur... au propre et au figuré!... Je lui renverse une bouteille d'eau sur la tête... Bon réflexe! Ça va mieux... Je reprends le volant, tout va bien...
Moment tranquille du côté d'Essaouira, on se fait des petits déjeuner de rois avec des galettes de pain local qui croustille et craque ses grains de sable sous la dent et une confiture à l'abricot je vous dis pas!... Un vrai régal!... On boit des litres de thé à la menthe, je joue et chante sur ma guitare, Anne aime bien...
Je crayonne un peu sur mon bloc les heures de couchant quand le paysage tourne en ombres chinoises sur un fond de ciel qui se dégrade du jaune au bleu et qui se pare d'un voile intangible à la teinte impossible d'une sorte de bleu acier surréaliste... Mieux que du Dali!... et juste un éclat d'argent discret... Vénus solitaire accrochée dans l'immensité se dénude et s'offre à nous... Splendide!...
Anne se languit fort de son petit Maxou en garde à Mazamet... On rentre par l'étonnante et interminable procession de Sainte Fatima au Portugal... On repart à Paris pour le solde de ses affaires, je récupère au passage mes premières impressions de "fragments" chez un imprimeur, on redescend par Montélimar, c'est là qu'on se quitte... Anne repart chez elle et moi à la recherche de ma roulotte...
Ça doit être octobre... et son étrange résolution... Un mois et demi de folies incertaines, de rencontres, de retrouvailles... de déambulations funambulesques... d'atterrissages sur des lunes étrangères... des textures inconnues, d'incompréhensibles univers... des conflagrations de galaxies... Des mondes et des mondes et des mondes... Quoi je sais?... Rien...
Je fais un voyage en douce avec Pascale du côté de l'Atlantique pour les marées hautes et basses de notre relation... Un genre d'équinoxe pour lever les équivoques et pacifier... On festoie, on visite les îles, on goûte les vins locaux, on remonte la Loire jusqu'à Sancerre... Là j'en peux plus! Je lui dit de me laisser là, à l'hôpital... J'ai le foie qui crie au secours, j'ai l'impression que je vais exploser!... Ça ira... On reprendra la route vers le sud, plus tranquille...
Je repars faire un tour à Lyon dire bonjour aux copines, je vois seulement Roselyne, c'est là que je décide d'arrêter de boire... Il est temps! Je repars en zig et zag, Montélimar, Montpellier, Mazamet, Montpellier, Montélimar, je rebondis d'un train l'autre, d'une rencontre l'autre, je sais pas où me poser... J'ai pas encore trouvé ma roulotte... Montélimar, Montpellier, Montélimar... Lyon! C'est mi novembre, c'est là que tout s'arrête et se rencontre...
Décembre, Anne m'attendait... Je lui ai écrit que je vivais autre chose, avec quelqu'une ou pas ça change rien... Je crois qu'elle a compris ce que je veux dire ici, elle respecte, c'est ce qu'elle dit... J'imagine une autre vie, une autre relation, d'autres rapports entre les hommes-femmes, les femmes-hommes et leurs fruits en dehors de la propriété, de l'ascendance et du choix imposé... "Comment tu t'appelles?"... Anne m'a demandé si j'avais une préférence pour un prénom, j'ai dit non, j'ai pas de pré-non...
J'ai dit tu portes, tu sais, laisse parler ton coeur, écoute ton ventre... Oublie ce que marmonne ta caboche, protège l'enfant de moi, de toi, de lui, des autres... Le protège pas, fais le minimum, fais comme tu sens, comme tu peux... Moi je sens ici essentiel en cet instant, je veux le vivre pleinement si je peux...
L'écriture, comme le reste, n'est que le reflet déformé et interprétatif de ma très subjective et ô combien relative perception du réel... Tel quel, aucune garantie!... Ma clé c'est moi, la serrure c'est toi, c'est tous les tois... La porte c'est la vie hors cadres, faut pas forcer les serrures, faut essayer les clés... Doucement aussi... Ouvrir les portes qui veulent et dégonder la vie!...
Porte Ouverte... Afrique encore, "L'aval en amont les fleuves peuvent s'arrêter"... Quels fleuves, quelles mémoires, quelles peurs, quelles vies, quelles amours?!... "L'esprit crie ses asservissements... Un enfant dort au creux de mon épaule... Il sait mon prochain silence et son envoûtement"...
C'est toujours Afrique, c'est ma pirogue et l'obscurité mouvante, j'entends presque les tam-tams en ma brousse citadine... Je ne connais pas cet enfant, c'est peut-être celui généré, c'est peut-être moi ou toi ou n'importe qui ou quoi...
C'est peut-être ces lignes enfantées par cette vie et ces rencontres en accords majeurs ou mineurs, en rires en larmes, en cris en peurs... C'est le seuil d'une nouvelle... Une sorte d'évangile païen pour le moins non affilié...
Porte Ouverte...
Les voyeurs à gaucheLes sourds à droite
Les muets au centre
... Je marche à l'envers... Je prends la pyramide Adam-Eve et hop! Je la retourne, épaulé-jeté! J'ai le moral! Chrome cobalt le moral, inoxydable! Je me glisse sous le goulot de l'entonnoir ainsi formé et je remonte chercher ces chers parents au lieu de descendre le petit... Imagine, c'est pas possible... C'est une erreur les vioques originaux!...
Je postule mon délire et arithmétise ou rythme une séquence simple, pour un individu (sauf avis contraire et si avis contraire je porte plainte contre l'éducation nationale et le bon sens commun) il faut deux parents, et pour deux parents quatre, et ainsi de suite... Pour rire et pour faire large, 3 générations par siècle... à 26 générations j'en suis à 67 millions 108864 individus, la machine à calculer fait la gueule, j'efface les centaines de mille et je vais juste dire bonjour au petit Jésus, passage clouté, traversée dangereuse...
Deux mille ans, 60 générations= 1(milliard?)147 973 millions de millions de passants mâles et femelles en nombre à peut près égal... Moi je suis déjà largué!... ( si un vrai mathématicien veut bien m'aider...) Je reviens ici en répartissant ce petit monde sur la déroute bimillénaire ça nous fait, je pose tout, 573 986 500 millions de quidams sans compter les virgules de mon genre ou du tien au siècle pour un échantillon humanoïde de ta race et un tour de manège gratuit pour toi!... Moi j'ai déjà la tête qui tourne et le compteur aussi... J'ai dû faire une erreur de calcul sans parler du postulat... Ils sont où mes parents?... Et le modèle de référence?... J'ai l'étalon dans les choux!...
Bon d'accord, c'est absurde, mon araignée me le disait justement... Mais papi-mami Eve-Adam ils me semblent atomisés là-haut! Le rêve Adam déborde! Moléculez toujours vous m'intéresse!... Alors la parent thèse familiale filiale et sociale... Je la referme et laisse tomber la pyramide et le goulot!... Mais c'est énorme tous ces gens qu'il a fallu, ces histoires, ce bouillonnement de messages de mémoires en moi, en toi... Faut pas laisser perdre, faut pas gâcher ni jeter ce charme, ce filtre aux égouts d'une morale ou d'une autre moi je trouve... Pas vous?... Ça serait dommage!... -Arrêt sur image- ... Je reviens arrière avant, poussant passé réactivant l'histoire, charmants bambins...
On sème quoi? L'amour ou la guerre?... On s'aime quand?... Les maisons pères-mères matriciant les mêmes carlingues en déglingue le long des âges, -fuselages inter sidérants-, on essaye d'intelliger, de faire le monde beau et réfléchi, poly-glaces astiquées au mirror de nos savantes connaissances, brillantes régulations des pré-dites naissances, cons homologués, bébés beaux, bien nourris aux normes du moment... Ça change souvent les normes!... Vous avez remarqué?... Enôrme médico-socio-éducatif!... Je m'en fiche du tiers comme du quart, comme d'autres du monde tiers et quart.... D'heure c'est le mien! Je dis, "Il est où l'amour?"... L'amour il est au moment où il se fait, c'est tout. Après c'est des histoires et les histoires ça fait un moment que j'entends les mêmes et ne vois rien venir sinon la sempiternelle et mortelle et macabre et funèbre déchirure parricide matricide fratricide, insecticide, pesticide et le reste... Vous en voulez encore?... J'ai plus faim!...
Anne!... Ma soeur Anne... Toutes mes soeurs Annes!... Ô combien nombreuses, ô combien amoureuses!... Internationalisons l'enfance! Symphonie gazouillante! Hymne inapparenté, inapproprié, "Allez les petits!"... Pas d'Papa pas d'Maman!... T'es cap'?... Annulation du programme commun d'autodestruction familier!... Du jeu de guerre familial!... Tout doux tout doux... Tranquille peinard... Réaction sans chaîne, action libre sans retour ni projection possessive sinon soi-même... Capacité égoïste à l'Etre avec l'avoir dépouillé du conflictuel... Verbe d'Etat... "J'AIME!"...
Moi je pense juste aux gens que j'ai connu-croisé depuis cette soi-disant naissance, combien ça fait?... Quelques milliers ou millions aperçus le long de ce court corridor courant de cette heure à celle-ci? Juste là... Quelques petits milliers mignons passants impressionnant ma vie, mes récepteurs sensitifs gavés, gravés, blessés, imprimés, sur-impressionnés depuis cette nuit-jour où je crie à ce monde qu'il est brutal!...
Et moi, je suis doux peut-être?... Je suis mieux que les autres peut-être pour faire le Papa modèle et savoir ce qui est bien pour le petit?... Ou pour le monde c'est pareil... Il est petit aussi... le monde... Non! Je veux juste sortir du possessif, "mon ton son, notre votre... Leurre!"... Vous êtes doux vous? Je suis d'où moi?... C'est où je vis?... Ma naissance?... Avant?... Avant-avant?... Trop compliqué... C'est important je vis, c'est tout je vis... C'est maintenant je vis... c'est ici je vis!...
C'est important la paix aussi pour vivre en soi... Douceur non militante, non croisade non armée, non duel de puissance... Soie partagée, puissants muscs, fleuves fantastiques, effluves fabuleuses, mémoire des entrailles retrouvées, sexes roses pour les filles, sexes roses pour les garçons... Quelle que soit la couleur ou la race, l'envoûtement est le même... Je prépare l'incantation magique...
Afrique farouche et douce, tu as tous les noms, tous les visages, toutes les textures les couleurs les odeurs... Berceau possible... L'Amour entier... Sans tabou... Porte Ouverte...
Je suis pas arrivé... Je suis pas mieux que mes parents ou d'aucun, alors pour la prétention éducative je repasse!... Par contre mes parents, pour la vie je leur dis merci! Très beaucoup!... Pour simplement être là moi et la ferveur qui parfois s'en dégage...
Pour le reste c'est des histoires, les joutes incessantes d'interprétations des plus subjectives... "Qui suis-je moi pour juger?"... Ni louange ni blâme... Juste de l'amour, de la tendresse, de la reconnaissance... Que reste-il?...
La Vie!... La vie dans tous ses aspects! Cette terrible, cette inenfermable, cette irréductible, cette fantastique, cette incroyable Vie!... Oui!... Alors si je peux faire pareil... Vous m'avez compris!... Silence... Jonction... Je t'aime!... De toutes les façons!...
PORTE OUVERTE...
Passe à ton voisin... Passe à ta voisine... Je t'aime...
PORTE OUVERTE...
PS: Aimez-vous vous même... Passez devant... Je fais pareil...
PORTE OUVERTE...
Faire-part... L'enfant est né... c'est une Mélodie... de la Vie!... C'est joli!
PORTE OUVERTE...
Toute ressemblance avec des personnages existants, présents passés ou futur est approximative...
Toute friction est purement imaginaire... Collectif réactif... Mémoires Anticipées.